Démarchage commercial : quelles nouvelles règles à retenir ?
Publié le 21 Mar 2023
Par Jenny Waszek

La prospection commerciale, qu’elle soit réalisée par email, SMS, appels téléphoniques, ou encore par courrier postal, est au cœur de la stratégie de nos entreprises. Elle permet en effet non seulement de fidéliser, mais aussi d’élargir sa clientèle.

Cependant, le démarchage est soumis à un encadrement légal strict, qui fait l’objet de contrôles réguliers. Ceux-ci sont réalisés notamment par la Commission Nationale de l’informatique et des Libertés (CNIL) et par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).

En 2022, la prospection commerciale a été identifiée par la CNIL comme un sujet de contrôle prioritaire. Depuis le 1er mars 2023, de nouvelles règles relatives à la prospection téléphonique sont entrées en vigueur (voir le décret n° 2022-1313 du 13 octobre 2022 relatif à l’encadrement des jours, horaires et fréquence des appels téléphoniques à des fins de prospection commerciale non sollicitée).

Les règles encadrant la prospection commerciale et le démarchage varient selon la cible de la prospection, à savoir en BtoB ou en BtoC, et le canal de prospection utilisé.  

Nous décryptons pour vous les principales règles à retenir en matière de démarchage commercial par email (I) et par téléphone (II).

Les explications ci-après constituent des lignes directrices, dont l’application pratique à vos campagnes de marketing devra être adaptée au cas par cas pour assurer leur conformité.

Démarchage par email

I – la prospection commerciale par email

1) La prospection commerciale par email en BtoC

Il convient de distinguer le cas des consommateurs qui sont déjà vos clients, de celui des simples prospects, soumis à un régime différent.

  • L’envoi d’emails de prospection à vos clients:

La règle à retenir dans ce premier cas est celle dite de l’« OPT OUT ».

Par principe, votre entreprise a le droit d’envoyer de la publicité à ses clients actuels, sans avoir à recueillir leur consentement préalable.

Les conditions sont les suivantes :

✔️votre client doit avoir été informé que son adresse électronique serait utilisée à des fins de prospection, par exemple via une mention informative figurant sur vos contrats, ou un lien vers votre politique de confidentialité;

✔️ la publicité doit concerner des produits ou services similaires à ceux que le client a déjà acquis chez vous;

✔️ enfin, vous devez intégrer un lien de désabonnement simple et gratuit.

⚠️ Les données des clients utilisées à des fins de prospection commerciale ne peuvent être conservées que pendant durée de la relation commerciale, puis, sauf exceptions, pour une durée de 3 ans à compter de la fin de cette relation commerciale (par exemple, à compter du dernier achat ou du dernier contact émanant du client), conformément aux recommandations de la CNIL.

En tout état de cause, les durées de conservations des coordonnées de vos clients doivent être fixées, justifiées et précisées dans votre politique de confidentialité. Nous pouvons vous assister pour déterminer les bonnes durées en fonction de vos objectifs et de la réglementation applicable.

  • L’envoi d’emails à des prospects :

S’agissant de simples prospects, la règle est celle de l’« OPT IN », qui signifie que vous ne pouvez démarcher un consommateur par email, si celui-ci n’a pas préalablement donné son accord.

L’article L.34-5 du Code des postes et des télécommunications électroniques prévoit en effet que :

« Est interdite la prospection directe au moyen d’un automate d’appel, d’un télécopieur ou d’un courrier électronique utilisant, sous quelque forme que ce soit, les coordonnées d’une personne physique qui n’a pas exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen […]

Il est donc primordial de mettre en place une méthode vous permettant de recueillir le consentement de vos prospects à recevoir vos offres commerciales, par exemple via l’adhésion volontaire à une newsletter commerciale.

⚠️ Le consentement du consommateur à recevoir de la prospection commerciale doit se manifester par une action positive et spécifique : par exemple, une case à cocher qui ne soit pas précochée.

Le consentement doit notamment être libre et éclairé. Pour ces deux raisons, l’acceptation de conditions générales d’utilisation ne peut suffire à valoir consentement du consommateur à recevoir de la prospection commerciale.

La règle relative au consentement préalable s’applique également aux personnes dont vous collecteriez les données sans qu’elles ne soient devenues vos clientes (ex : collaborateurs, partenaires, candidats à un poste etc.).

⚠️ Réutiliser une adresse email obtenue pour une finalité spécifique, dans l’objectif d’adresser de la publicité non consentie, constitue un « détournement de finalité » passible de sanctions pénales et d’amendes.

L’article L.226-21 du Code pénal prévoit en effet que :

« Le fait, par toute personne détentrice de données à caractère personnel à l’occasion de leur enregistrement, de leur classement, de leur transmission ou de toute autre forme de traitement, de détourner ces informations de leur finalité telle que définie par la disposition législative, l’acte réglementaire ou la décision de la Commission nationale de l’informatique et des libertés autorisant le traitement automatisé, ou par les déclarations préalables à la mise en oeuvre de ce traitement, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. »

2. La prospection commerciale par email en BtoB

Les principes sont plus souples lorsque le démarchage s’adresse à des professionnels.

Les règles protectrices des professionnels concernent uniquement les emails incluant les coordonnées de personnes physiques (nom, initiales, etc.), par exemple : jw@arborescence.legal

En revanche, les adresses professionnelles génériques de type Info@société.com ou contact@arborescence.legal sont des coordonnées de personnes morales. Vous pouvez donc les démarcher sans respecter les règles ci-après.

Lorsque vous collectez l’adresse email nominative d’un professionnel, il vous appartient de l’informer que :

✔️  vous entendez utiliser son adresse mail à des fins de prospection commerciale en rapport avec son activité professionnelle ;

✔️ celui-ci peut s’opposer à cette utilisation de manière simple et gratuite, par exemple via un lien de désabonnement.

Cette règle s’applique également lorsque vous récupérez les adresses mails des professionnels auprès de tiers.

⚠️ L’objet de la sollicitation doit en tout état de cause être en rapport avec la profession de la personne démarchée.


Par exemple : vous pouvez adresser un email de prospection concernant un nouveau logiciel métier à un avocat à son adresse professionnelle nominative : jw@arborescence.legal

Que faire si vous avez omis d’informer les personnes concernées (professionnels ou consommateurs) au moment de la collecte de leurs coordonnées ? 

 Si vous n’avez pas informé les prospects au moment de la collecte de leurs adresses emails, il sera en principe nécessaire de leur envoyer un mail d’information et d’opposition avant la première prospection commerciale.

Nous pouvons vous assister pour assurer la conformité des actions de démarchage et/ou de marketing qui n’auraient pas été suffisamment anticipées.

Prospection commerciale par email ou téléphone

II – la prospection commerciale par téléphone


Que vous appeliez un consommateur ou un professionnel, la personne contactée doit là encore, au moment de la collecte de son numéro de téléphone :

✔️être informée que son numéro de téléphone sera utilisé à des fins de prospection ;
✔️être en mesure de s’opposer à la prospection de manière simple et gratuite.

Chaque appel doit permettre à la personne démarchée de connaitre :

✔️ l’identité de l’organisation qui la contacte ;

✔️ d’exprimer, si elle le souhaite et par un moyen simple, son refus de recevoir de nouvelles sollicitations (par exemple, via un SMS de désabonnement ou l’expression du refus à l’oral qui doit être enregistré par l’appelant).

Depuis le décret n° 2022-1313 du 13 octobre 2022 entré en vigueur le 1er mars 2023, les règles relatives à la prospection téléphonique ont évolué.

A moins d’avoir obtenu un consentement exprès et préalable au démarchage téléphonique et de pouvoir en rapporter la preuve, vous ne pourrez plus démarcher vos clients par téléphone que :

✔️ Du lundi au vendredi (à l’exclusion des jours fériés);

✔️de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 20 heures.

Il est désormais également interdit de :

démarcher ou tenter de démarcher un même consommateur plus de quatre fois par mois;

recontacter un consommateur ayant refusé le démarchage avant l’expiration d’un délai de 60 jours.

Le respect de ces règles est sanctionné par l’article L.242-16 du Code de la Consommation, qui prévoit que :

« Tout manquement aux dispositions des articles L. 223-1 à L. 223-5 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale ».

La CNIL comme la DGCCRF sont régulièrement saisies de plaintes émanant de personnes ayant été démarchées en violation des principes précités. Anticiper et mettre en conformité vos actions marketing permet ainsi non seulement d’améliorer votre image de marque, mais encore d’échapper à des contrôles et le cas échéant, à des sanctions.

Vous avez besoin d’un conseil sur une de vos pratiques commerciales ? Parlons-en ensemble !

Démarchage règles juridiques à retenir